Raconter un conte de fées, exprimer toutes les images qu’il contient,
c’est un peu semer des graines dont quelques-unes germeront dans
l’esprit de l’enfant. Certaines commenceront tout de suite à faire leur
travail dans le conscient ; d’autres stimuleront des processus dans
l’inconscient. […] Mais les graines qui sont tombées sur le bon terrain
produiront de belles fleurs et des arbres vigoureux ; c’est-à-dire
qu’elles donneront de la force à des sentiments importants, ouvriront
des perspectives nouvelles, nourriront des espoirs, réduiront de
angoisses, et, ce faisant, enrichiront la vie de l’enfant, sur le moment et
pour toujours (ibid. : 234).
Jean-Louis Tritter, dans Le conte philosophique (2008), distingue trois
des types cités précédemment, à savoir : le conte féerique ou merveilleux, le
conte fantastique et le conte philosophique. Notamment, il désigne le XVIIIe
siècle comme étant l’éclosion du conte merveilleux avec à l’origine Antoine
Galland et sa traduction de l’arabe de Les Mille et une nuits, à partir de
1704. Citant Propp, Tritter montre que ce type de conte incorpore des
« critères rigides » comme une phrase initiale caractéristique (Il était une
fois), une progression dans la narration débouchant sur un heureux
dénouement, ainsi qu’une « fantaisie de l’imagerie populaire » dans laquelle
« les souillons deviennent des princesses, les citrouilles des carrosses, les
princes sont tous charmants ».
En ce qui concerne le conte fantastique, Tritter le qualifie d’« objet
littéraire ». Il est proche du réel mais n’a pas de sens ni d’explication
rationnelle. Le lecteur doit se laisser emporter, se questionner et s’inquiéter
des réponses. En effet, proche du conte de fées, le conte fantastique est un
récit qui commence comme un roman mais au cours duquel des éléments
irréels, surnaturels entrent en scène. Il est alors difficile, tant pour le lecteur
comme pour le héros lui-même, de différencier la réalité du fantastique, de
l’imaginaire.
Au sujet du conte philosophique, Tritter souligne la différence avec le
féerique : « le refus de l’adhésion au récit » et avec le fantastique :
« l’évidence des réponses raisonnées de la fin », en concluant que le conte
philosophique intéresse mais n’émeut pas.
Le conte philosophique incorpore des situations presque réelles, des
personnages familiers. Il est souvent la représentation des idées, la plupart
nouvelles, de l’auteur et de sa voix contre l’ordre établi, contre la société du
moment. Pour cela, il se sert de l’imaginaire, avec un personnage principal
qui lutte contre ses ennemis ou doit les affronter, combat dont la fin ou la
conclusion reste indéniablement évidente mais n’est pas incluse. Il contient
un message, mais celui-ci est masqué. Donc, le lecteur doit s’efforcer de le